L’islamophobie actuelle rappelle l’antisémitisme des années 30
L’islamophobie actuelle rappelle l’antisémitisme des années 30
Al Manar
publié le samedi 6 novembre 2010.
05/11/2010
La montée de l’islamophobie rappelle le début de l’antisémitisme des années 30, a estimé dans un entretien à l’AFP le patron de l’Organisation de la conférence islamique (OCI), qui juge que certains responsables politiques européens encouragent ce phénomène. "J’ai peur que nous nous dirigions vers un processus rappelant le début des années 30, quand le sentiment antisémite est devenu une question politique", entraînant "la montée du fascisme et du nazisme", a déclaré le secrétaire général de l’OCI, Ekmeleddin Ihsanoglu. "Je pense que nous n’en sommes qu’au tout début", a-t-il ajouté.
Selon lui, le sentiment islamophobe se développe, comme en témoignent l’opposition à la création d’une mosquée près de "Ground Zéro" à New-York ou les agressions contre les musulmans en Europe et aux Etats-Unis. "Des gens ont profané des tombes de soldats musulmans morts pendant la Première guerre mondiale en défendant des pays européens, juste parce qu’ils étaient musulmans", a-t-il déploré. "Ce qui m’inquiète, c’est que certains partis politiques, au lieu d’arrêter ou de combattre (l’islamophobie), l’utilisent à des fins politiciennes, afin de recueillir plus de voix lors des élections", a souligné le patron de l’OCI qui réunit 58 Etats-membres.
M. Ihsanoglu est particulièrement préoccupé par l’institutionnalisation du sentiment islamophobe en Europe, avec par exemple l’interdiction de nouveaux minarets en Suisse ou celle de la burqa en France.
Le port de la burqa "ne concerne qu’un petit nombre de personnes. Cela fait partie de vieilles habitudes de certaines tribus dans certains pays, cela n’a rien à voir avec l’islam", a jugé ce Turc, né au Caire en 1943. L’interdiction de la burqa représente "une forme de xénophobie. C’est refuser les droits des autres. Les +valeurs européennes+ dont l’Europe se prévaut depuis des années, le multiculturalisme, le pluralisme, elle les nie dans ses propres pays", a regretté M. Ihsanoglu.
Selon lui, aux Etats-Unis, l’islamophobie n’est pas aussi virulente, parce que les immigrés musulmans y ont un plus haut niveau d’études et s’intègrent donc plus facilement, mais aussi parce que ce pays a historiquement une tradition d’accueil de migrants de différentes confessions. Une autre différence essentielle est la manière dont Washington gère les situations, a-t-il ajouté, en donnant l’exemple de l’affaire du pasteur qui voulait brûler des exemplaires du Coran, pour l’anniversaire des attaques du 11 septembre. "Le gouvernement américain a pris ses responsabilités, lui a parlé et l’a convaincu de ne pas le faire", a noté M. Ihsanoglu.
S’il plaide pour des compromis culturels, le patron de l’OCI estime néanmoins que certaines lignes ne doivent pas être franchies, comme dans le cas des caricatures danoises du prophète Mahomet, qui avaient déclenché en 2005 la colère du monde musulman. "Nous demander d’accepter ces caricatures, c’est comme nous demander d’accepter des injures", a-t-il affirmé.
Selon lui, au fur et à mesure que les musulmans arrivant en Occident auront "un mode de vie moderne", les différences s’aplaniront. Mais d’après M. Ihsanoglu, il ne faut pas chercher à "assimiler" les musulmans. "Si l’Europe et l’Occident défendent les droits des minorités à travers le monde, pourquoi, quand cela les concerne, nous parlons d’assimilation ?", s’est-il interrogé. "L’Europe doit comprendre la réalité de l’islam aujourd’hui. La réalité c’est que l’islam n’est pas une religion étrangère à l’Europe. L’islam est une religion européenne et l’Europe doit l’accepter", a-t-il affirmé.
(AFP)
http://www.almanar.com.lb/newssite/NewsDetails.aspx?id=161103&language=fr