Un sondage sur les pratiques touristiques en algérie

Publié le par Mahi Ahmed

Un sondage sur les pratiques touristiques en algérie

Sept millions d'Algériens ont fait du tourisme en 2008

Alors que traditionnellement la très grande majorité des Algériens consacrait son congé à se reposer plutôt chez elle, de plus en plus nombreux sont ceux qui l'utilisent pour de vraies vacances, en dehors de leur lieu de résidence, quelquefois à l'étranger. Les destinations et les activités pratiquées durant ces vacances se diversifient aussi et les budgets consacrés sont parfois conséquents.

Quelle est la proportion des Algériens qui passe ses vacances en dehors de chez soi et quelle proportion va à l'étranger ? Où vont les Algériens, passent-ils par une agence de voyages, comment passent-ils leurs vacances ? Vont-ils en famille ou non, quel budget leurs consacrent- ils ... ? Apporter des réponses à ces questions permet de prendre la mesure des transformations qui s'opèrent lentement mais sûrement dans la société algérienne. C'est à cet objectif que s'attelle ce sondage réalisé par Ecotechnics entre le 10 et le 27 juin 2009 auprès d'un échantillon de 1000 personnes représentatif de la population algérienne de plus de 18 ans. La méthode d'échantillonnage est celle des quotas. Les variables de contrôle sont la région, la dispersion géographique (urbain-rural), la classe d'âge, le sexe, et le niveau d'instruction. Trois articles composent cette analyse. Un premier article caractérise les pratiques rapportées par les interviewés sur leurs vacances en 2008. Un deuxième retrace les projets de destination que faisaient les individus en juin dernier pour l'été 2009. Un troisième tente enfin de cerner le profil des individus qui partent en vacances.

 Quelle proportion d'Algériens part en vacances ?

Le sondage nous apprend que durant l'été 2008, 62% des Algériens adultes considèrent qu'ils n'ont pas pris de vacances. 12,5% considèrent qu'ils ont pris des vacances même en étant restés chez eux. Enfin, 25,4% sont partis de chez eux. Cette dernière proportion donne la mesure de l'ampleur prise par le phénomène du départ en vacances.

 En Algérie ou à l'étranger ?

Les 25,4% se décomposent en 21% qui sont restés chez eux et 4,4% qui sont partis à l'étranger. En 2008, ces 4,4% dépassaient légèrement le million d'individus (adultes) et les 21%, 4,8 millions d'individus (adultes). Selon nos estimations, le nombre d'Algériens sortis en vacances à l'étranger tous âges confondus aurait été de 1 200 000 environ en 2008. Et ceux qui sont partis de chez eux mais qui sont restés en Algérie d'un peu moins de six millions de personnes. En dehors de la Tunisie pour laquelle le nombre d'adultes enregistrés approchait les 650 000, les autres pays n'ont vu arriver chez eux qu'un nombre modestes d'Algériens venus y passer des vacances : environ 70 000 pour le Maroc, près de 50 000 pour la France et une ou deux dizaines de milliers pour toutes les autres destinations. Le défaut de visa et la possibilité d'aller en voiture fait une grande différence entre la Tunisie et les autres pays.

 Seul, en famille ou avec des amis ?

Quand ils se déplacent pour des vacances en Algérie, les Algériens adultes sont environ 25% à le faire seuls, 60% à le faire en famille et 15% avec des amis. Les proportions sont presque identiques pour les vacances à l'étranger : 26%, 56% et 18% respectivement.

 L'hébergement

Les lieux d'hébergement durant les vacances montrent évidemment des différences importantes entre les personnes qui passent leurs vacances en Algérie et celles qui les passent à l'étranger. Dans ce dernier cas, soit ils louent des appartements, soit ils vont à l'hôtel dans leur majorité et à égalité avec 38% chacun pour chaque mode de résidence. Ils sont suivis de très loin par l'hébergement chez des amis (19%). D'autres modalités se partageant les 7% restants. Lorsque les vacances sont passées en Algérie, l'hébergement par des amis vient en premier et de loin (50%). Vient ensuite le camping ou la location d'appartements avec respectivement 16% et 15%. Un nombre relativement important les passe dans une autre résidence (10%). Les autres modalités (hôtel et autres), se partagent 9%. Il faut noter ici l'importance insoupçonnée prise par deux « marchés », celui du camping et celui de la location d'appartements qui concernent chaque année près d'un million de personnes chacun tous âges confondus.

 Les agences de voyages

Le recours aux services des agences de voyages est quasiment inexistant lorsque les Algériens passent leurs vacances dans leur pays, 2% seulement y ont recours, soit un peu moins de 100 000 personnes. La proportion est par contre élevée pour ceux qui passent leurs vacances à l'étranger (44%), soit un peu moins de 500 000 personnes. La population qui a recours aux agences de voyages se décompose entre 17% de vacanciers en Algérie et 83% à l'étranger. Cela représente un potentiel très important et explique le développement rapide des agences au cours des dernières années.

 Les activités durant les vacances

Qu'ils restent au pays ou qu'ils partent à l'étranger, les Algériens semblent se consacrer à un éventail restreint d'activités durant leur séjour. Les activités sportives ou la lecture sont pratiquées par une proportion plutôt réduite de la population adulte (22 à 28% pour le sport et 18 à 19% pour la lecture). Les autres activités recueillent des scores plutôt élevés mais avec parfois des différences très importantes dans les proportions, selon qu'on prenne les vacances à l'étranger ou que l'on reste en Algérie : promenades et randonnées : 83 à 88%, visites de sites : 62 à 84, soirées familiales : 80 à 77%. Mais la différence la plus importante réside dans les proportions pour les spectacles qui recueillent plus la faveur des Algériens quand ils partent à l'étranger (58%) que quand ils restent en Algérie (23%).

 La durée du séjour

La durée moyenne du séjour en Algérie est de 20 jours. Toutefois cette durée est très fortement dispersée. En fait le tiers des vacanciers prend entre 1 et 10 jours, un autre tiers entre 11 et 20 jours et enfin l'autre tiers une durée de vacances supérieure à 20 jours. La durée des séjours à l'étranger est plus courte. Cela apparaît déjà dans la durée moyenne du séjour qui est de 16 jours, soit 4 jours de moins que la durée moyenne du séjour en Algérie. Cela apparaît aussi dans le fait que pour près de 42% des personnes qui vont à l'étranger le séjour est inférieur à 10 jours. Pour 42%, il se situe entre 11 et 20 jours. Il n'est supérieur à 20 jours que pour 16% contre 33% dans le cas des séjours en Algérie.

 Le budget

Pour les personnes qui passent leur séjour en Algérie, la moyenne du montant consacré est d'environ 21 405 DA. Mais cette moyenne cache d'importantes disparités. Elle est de 15 400 DA à peu près lorsque les personnes partent seuls, de 25 300 DA lorsqu'elles partent en famille et enfin de 18 350 lorsqu'elles partent avec des amis ou des collègues. Le niveau des dépenses est beaucoup plus élevé pour les séjours à l'étranger puisqu'il atteint près de 100 000 DA, avec toujours là aussi d'importantes disparités. Lorsque les citoyens partent seuls, la moyenne est de 148 000 DA. Toutefois, cette moyenne est fortement influencée par les dépenses pour la Omra ou le hadj. Lorsque les personnes partent en famille, la moyenne est de 87 000 DA environ. Lorsqu'ils partent avec des amis ou des collègues, elle est de 85 000 DA.

 Partir en vacances chaque année ?

A la question « Avez-vous les moyens de partir en vacances chaque année ? », environ 16% des adultes répondent par l'affirmative, 67% par la négative alors que 17% ne savent pas. On est ici face à un phénomène minoritaire, mais qui prend de l'ampleur au fur et à mesure que le revenu des Algériens s'accroît. La tendance d'un tourisme alterné, d'un départ une année sur deux ou sur trois semble se généraliser. Mais le revenu n'est en réalité pas le seul facteur qui détermine l'extension de la pratique du tourisme. Voir notre article « Qui part en vacances ? »

  (Sondage d'opinion réalisé du 10 au 27 juin 2009 auprès d'un échantillon de 1000 personnes de 18 ans et plus, représentatives de la population algérienne adulte)

23 juillet 2009

Qui part en vacances ?

Si les revenus interviennent, à coup sûr, pour expliquer le fait que les personnes partent ou non en vacances, ce comportement s'explique aussi et peut être plus par d'autres facteurs. Mais l'interdépendance entre ces facteurs empêche d'isoler l'action de chacun d'eux. Parmi ces facteurs, le niveau d'instruction, l'âge, le sexe, la situation individuelle, etc. montrent toujours une forme de corrélation avec les comportements sociaux.

C'est d'ailleurs pour cela que les variables qui mesurent ces facteurs sont généralement utilisées comme variables de stratification pour constituer les échantillons d'enquêtes sociologiques. Mais l'énumération fastidieuse des résultats des croisements des variables reflétant les pratiques ou les opinions avec les variables de stratification ne peut constituer en elle-même un modèle explicatif. Les pratiques sociales reflètent des actions à la fois d'imitation et de distinction par lesquelles s'identifient et se caractérisent les groupes sociaux. Les mêmes schémas d'imitation et de distinction jouent pour les individus ou les ménages au sein des groupes sociaux eux-mêmes. Il faut d'abord, ici, noter la vitesse de diffusion d'un phénomène qui jusqu'à il y a une dizaine d'années était freiné par de nombreux obstacles : difficulté des déplacements à l'étranger, faiblesse des infrastructures touristiques, terrorisme et problèmes de sécurité. Bien que ces problèmes persistent, ils se sont quelque peu détendus et des formes adaptées de tourisme se mettent progressivement en place. Pour l'étranger, le développement de l'offre des agences de voyages en nombre et en destination en est un indice probant. Pour les vacances en Algérie, le développement de la location temporaire privée et des infrastructures privées de camping en est un autre. Sur cet enracinement progressif du phénomène dans les habitudes vont se greffer ensuite les phénomènes d'imitation et de distinction.

La première frontière délimite entre ceux qui peuvent partir et ceux qui ne le peuvent pas. Mais bien que redoutable, cette frontière se module ensuite notamment par rapport au type de ménage : comment part-on ? Seul ou en famille ou seulement une partie de la famille ? le statut des femmes dans le ménage devient alors crucial. Lorsque la destination est l'étranger la proximité culturelle devient alors un facteur important contribuant à émousser, dans une certaine mesure, un des objectifs du tourisme à l'étranger, la découverte. La gestion de la question féminine va aussi imprégner fortement les modalités d'hébergement, comme le camping par exemple, ou les pratiques comme la plage ou les spectacles. On voit donc que l'« explication » à l'aide des variables de stratification habituelles ne peut au mieux que constituer un simple repérage devant porter, orienter un modèle explicatif plus complet introduisant les logiques de comportement des groupes et des individus. C'est ce qu'il faut avoir à l'esprit en prenant ci-dessous l'exemple de la question de qui part en vacances.

Un premier phénomène est que les régions de l'intérieur, notamment les Hauts-Plateaux, et à un moindre degré le Sud, fournissent relativement plus de touristes que les régions littorales. Ceci se comprend d'autant mieux que la principale destination à l'intérieur du pays est précisément le littoral. Mais sur cette tendance se greffe une autre qui est que la destination étranger est plutôt l'apanage des grandes villes où se concentrent les revenus les plus élevés. Une autre, est, comme on pouvait s'en douter la plus grande fréquence de la pratique des vacances en milieu urbain qu'en milieu rural : 35% des urbains prévoient de partir en vacances en 2009 contre 15% en milieu rural. Phénomène assez surprenant, il y a presque autant de femmes que d'hommes qui affirment partir en vacances cet été : 30% d'hommes contre 25% de femmes. La pratique des vacances en famille ou avec des amis explique bien évidemment cette présence des femmes assez forte. L'équilibre hommes-femmes est quasiment respecté pour les différentes destinations.

L'âge jouerait par contre de manière négative. Alors que 33% des 18-24 ans pensent aller en vacances, ce sont seulement 15% des plus de 55 ans qui l'affirment. Mais l'effet le plus net est sans doute celui de l'instruction. Il apparaît nettement que plus on est instruit et plus on part en vacances. La proportion passe ainsi de 10% pour les analphabètes à 50% pour les individus de niveau supérieur. La liaison avec le niveau d'instruction apparaît encore plus forte pour les départs à l'étranger. Dans ce dernier cas, l'augmentation de la proportion en fonction du niveau d'instruction est beaucoup plus rapide encore que l'augmentation des départs en vacances en Algérie. Deux derniers « croisements » nous permettent enfin de voir comment joue la situation individuelle, ou, lorsque les personnes sont occupées, la situation dans la profession.

Il apparaît que ces variables sont effectivement fortement discriminantes. Pour la situation individuelle, on a d'un côté, les occupés permanents, les étudiants et les personnes au Service national dont les proportions d'intentions de départ atteignent près de 45% et de l'autre, les chômeurs, les retraités et les femmes au foyer dont les proportions sont les plus faibles, variant entre 10 et 15%. Entre les deux catégories se trouve un groupe hétérogène constitué par les occupés occasionnels et qui atteint 25% d'intentions de départ. En fait, même si les deux groupes ont en commun une proportion élevée dans un cas et une proportion faible dans l'autre, ils se caractérisent eux-mêmes par une grande hétérogénéité. C'est ainsi que la proportion élevée chez les étudiants et les individus au Service national s'explique plutôt par l'âge comme on l'a vu plus haut et sans doute le niveau d'instruction, qui se cumulent pour donner une forte mobilité, même si les revenus de ces deux catégories sont faibles. A l'inverse, l'effet revenu et stabilité de ce revenu devrait être prédominant dans l'explication de la proportion élevée atteinte par les travailleurs permanents. C'est la variable revenu qui explique aussi la faiblesse de la proportion chez les chômeurs. Pour les retraités et les femmes au foyer c'est plutôt une mobilité moindre de ces catégories.

23 juillet 2009

Les destinations 2009

En juin 2009, période durant laquelle nous avons réalisé le sondage, nous avons posé la question sur la manière dont les Algériens allaient passer leurs vacances. Il s'agissait donc de prévisions et non de pratiques effectives.

A la question « Pensez-vous prendre des vacances cette année ? » près de 63% ont répondu par la négative, 27% par oui, alors que le reste (10%) ne savait pas. Parmi les 63% qui ne pensaient pas partir en vacances, 83% évoquent le manque de moyens et le reste, 17%, une autre raison, dont une très faible minorité, 1% qui ne veut pas les passer en Algérie. La très grande majorité des personnes qui a répondu par la négative, soit 81%, n'a pas pris non plus de vacances en 2008. Ces personnes qui ne pensent pas en prendre en 2009, totalisent plus de 50% de la population algérienne adulte. A ces 50% s'opposent quelques 15% qui ont pris des vacances en 2008 et comptent en prendre en 2009, en partant de chez eux. On retrouve ainsi presque la même proportion que ceux qui déclarent avoir les moyens de partir en vacances chaque année.

Les 35% de la population entre les deux sont dans une situation variable. On a posé, à ceux qui pensaient qu'ils allaient prendre des vacances en 2009, et qui sont donc 27% de la population adulte, la question de savoir où ils allaient les passer : rester chez eux, partir mais en Algérie ou enfin à l'étranger. Les 27% se décomposent ainsi en 17, 4% projetant de partir de chez eux mais de rester en Algérie, 2,8% se considèrent en vacances tout en restant chez eux et enfin 4,2% vont partir, mais à l'étranger, alors que 2.6% ne savaient pas. On voit donc que le nombre d'Algériens qui avaient l'intention de passer leur vacances à l'étranger, les adultes tout au moins, ne dépassait pas le million, en légère régression par rapport à 2008. Ceux qui passeraient leurs vacances en Algérie, à un autre endroit que leur lieu de résidence habituel, sont quatre fois plus nombreux. Pour l'étranger, on retrouve la destination la plus prisée qu'est la Tunisie. Les autres destinations arrivent très loin derrière. La France vient en deuxième posiution avec six fois moins de touristes que vers la Tunisie. Puis viennent pratiquement à égalité et à un chiffre moindre de moitié que la France, l'Espagne, le Maroc, la Omra.

La Grèce et la Syrie enregistrent des scores honorables mais le nombre d'adultes qui s'y dirigent est de moitié moindre encore que le nombre de ceux qui vont au Maroc ou en Espagne, c'est-à-dire vingt-cinq fois moins que vers la Tunisie. Il y a bien évidemment d'autres destinations. Mais ces dernières n'atteignent pas la vingtaine de milliers d'adultes nécessaires pour apparaître dans notre échantillon. Il faut noter une importante différence avec les destinations de 2008. Pour les pays européens, ceci est lié à une augmentation importante de la destination France. Pour les autres pays, cela semble aller de pair avec l'offre des agences de voyages, certaines destinations de 2008 étant moins proposées. La population qui va à l'étranger connaît assez rarement l'Algérie. 70% d'entre eux reconnaissent en effet qu'ils ne connaissent pas suffisamment l'Algérie. Au niveau national, les destinations côtières sont privilégiées. Parmi les wilayas côtières, Béjaïa, Jijel, Annaba, Oran et Alger recueillent les chiffres les plus élevées, mais de manière très inégale. Béjaïa approche presque le million d'adultes, alors que Alger ne dépasse que péniblement les cent cinquante mille.

Les autres wilayas ou sites côtiers recueillent des chiffres nettement moindres. Aïn Témouchent, Mostaganem, Tipaza, Skikda enregistrent des chiffres honorables au-dessus de 100 000 adultes. Viennent, toujours sur la côte des destinations moins attractives entre 20.000 et 50.000 adultes : Azzefoun, Cherchell, Dellys, Collo, La Calle. Ce sont les mêmes chiffres qu'enregistrent de nombreuses wilayas de l'intérieur (Sétif, Khenchela, Batna, Béchar, El Oued, Souk Ahras, Tébessa, Tiaret, Djelfa, etc.). Ces derniers mouvements semblent plus liés à des retours vers les wilayas d'origine où l'estivant disposerait de facilités pour passer des vacances, soit en ayant lui-même une autre résidence, soit en y étant accueilli par de la famille ou des amis.

23 juillet 2009

 

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Publié dans Economie et société

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