Revenir aux fondamentaux : un arbitrage inévitable à terme

Publié le par Mahi Ahmed

Revenir aux fondamentaux : un arbitrage inévitable à terme

Par : Mustapha Mekideche

En ce mois de Ramadhan et de congé où la plupart d’entre nous peuvent avoir tendance à somnoler des choses importantes, ont eu lieu dans le monde et chez nous. Dans le monde, par exemple, la Chine est devenue la deuxième économie mondiale en dépassant le Japon en termes de PIB. Mais examinons ce qui s’est passé d’important en Algérie.
L’économie étant la science de la rareté, l’adéquation entre ressources et emplois, offre et demande, en est une question récurrente essentielle, y compris chez nous. Aussi, en ce qui me concerne, l’expansion budgétaire et l’explosion attendue de la consommation nationale de gaz naturel constituent les deux préoccupations majeures qui émergent en cette période estivale. Rappel des faits.
D’abord les principales dispositions de la loi des finances complémentaire pour 2010 confirment l’expansion budgétaire en tant que levier de la croissance : budget de fonctionnement st supérieur au budget d’investissement (3446 milliards DA contre 3022 milliards DA), baisse de la fiscalité pétrolière (344 milliards DA) n’a été compensée que de moitié par l’augmentation de la fiscalité ordinaire (176 milliards DA). Le recours au fonds de régulation des recettes (FRR) permet, pour le moment, de rééquilibrer les budgets (mais pour combien de temps encore ?) mais il nous rappelle du même coup la question de sa réalimentation en termes de volume et de durée. C’est pour cette raison que certains instruments budgétaires de soutien mis en place devraient être assortis non seulement de conditionnalités mais aussi de mesures d’efficacité.
Des évaluations régulières devraient être effectuées pour en ajuster les montants et les durées de validité. La réactivation des activités de la Cour des Comptes me semble aller dans ce sens. Il reste néanmoins à mettre en œuvre ce qui est prévu par la loi : le contrôle des conditions  d‘exécution des exercices budgétaires par le Parlement. C’est à l’aune d’un tel système de contrôle  et de suivi que l’on devrait ajuster la tarification des services publics, supprimer des rentes indues ou moduler certaines aides en fonction des résultats obtenus. Mais la problématique de l’adéquation à long terme entre ressources et emploi ne se pose pas uniquement pour les finances publiques, elle se pose aussi pour le gaz naturel car pour le pétrole on le savait déjà. Voyons pourquoi.
Le programme indicatif d’approvisionnement du marché national en gaz naturel 2010-2019, rendu public le 1er septembre, prévoit ,sur la base d’un scénario moyen, une demande de 45,2 milliards de m3/an en 2019. En 2009 la consommation a été de 27,5 milliards de m3. Même revues à la baisse ces prévisions anticipent une augmentation de la demande d’un peu moins  du double.  Là aussi l’adéquation à moyen et long terme entre l’offre et la demande pose problème. Alors qu’elles en sont les variables d’ajustement ? Du côté de la demande il y a trois segments : la distribution publique, les clients industriels hors ceux de Sonatrach, les clients de Sonatrach essentiellement les pétrochimistes et gazochimistes. À mon sens la composante de la variable d’ajustement de la demande sur laquelle il conviendrait d’agir est cette dernière citée car les deux premiers segments ont besoin de cette énergie pour le développement social et la promotion d’une économie  hors hydrocarbures. Pour ce faire il faudra d’abord s’en tenir au scénario de base (14,2 milliards m3) du segment retenu et abandonner pour le moment le scénario fort (19,5 milliards m3). Mais dans tous les cas la question de la tarification de l’électricité et du gaz se posera ne serait-ce que pour donner à Sonelgaz les moyens de sa politique d’investissement sous réserve d’une amélioration de la qualité de service qui a tendance à baisser. S’agissant des projets gazochimiques en partenariat, et en l’état actuel, il faudra également éviter que l’avantage comparatif du prix du gaz ne se transforme en transfert de rente.
Du côté de l’offre, il y a l’enjeu pressant de la reconstitution des réserves d’hydrocarbures et singulièrement de gaz naturel pour prendre en charge les besoins attendus pour le marché national et l’exportation. Pour le gaz naturel, en s’en tenant aux prévisions indiquées plus haut et à l’objectif affiché d’exportation de 85 milliards de m3/an, c’est 130 milliards de m3 qu’il faudra produire annuellement pour la fin de cette décennie et au-delà. C’est ce qui explique probablement la visite du ministre de l’énergie et des mines, Youcef Yousfi, sur le périmètre du gisement gazier de Menzel Ledjmet (bloc 405 b) dans la wilaya de Ouargla pour donner “une impulsion aux capacités du secteur des hydrocarbures en matière de production de gaz”. C’est ce qui explique aussi le lancement par Alnaft, le 2 septembre 2010, du troisième appel d’offres international pour l’exploration et l’exploitation de 10 blocs d’hydrocarbures. Il faut rappeler à ce sujet que le deuxième appel d’offres lancé en décembre 2009 n’avait permis d’attribuer que trois permis sur les dix mis sur le marché. Là aussi des ajustements pourraient être faits pour stimuler, le cas échéant, l’exploration et la recherche. Ceci dit et pour conclure, je ne partage cependant pas le pessimisme affiché par certains économistes sur cette question.
Je voudrai leur rappeler qu’au début de la décennie 70, avant l’embargo de 73, le fameux rapport de James Akins commandée par le président Nixon remettait en cause non seulement l’état des réserves de pétrole des Etats-Unis mais aussi  la capacité de ce pays à couvrir sa demande. C’est une des raisons (cachée) de l’augmentation des prix de 1973. Cela nous enseigne que la question des réserves d’hydrocarbures n’est ni neutre ni simple, y compris aujourd’hui. 

http://www.liberte-algerie.com/edit.php?id=142210

Publié dans Economie et société

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