Tunisie : Libertés individuelles et égalité : Le modèle de société au centre de la bataille

Publié le par Mahi Ahmed

 Tunisie : Libertés individuelles et égalité : Le modèle de société au centre de la bataille

 

24/06/2018

 

Par Sofiene Ben Hamida

 

 

 

Depuis la publication du rapport sur les libertés individuelles et l’égalité, une compagne intégriste, disposant visiblement de moyens énormes et utilisant toutes les franges rétrogrades et passéistes du pays, s’organise et tente de bloquer une éventuelle initiative législative portant sur l’égalité dans l’héritage et le renforcement des libertés individuelles.

 

 

 

Mais ce n’est pas tant cette campagne qui dérange. Dans toutes les sociétés démocratiques, le débat contradictoire et la confrontation des idées restent les conditions nécessaires pour faire avancer les choses. Ce qui est grave par contre, c’est cette volonté évidente chez les opposants du rapport de monter une frange de Tunisiens contre une autre frange, leurs appels, directs chez certains, à peine voilés chez d’autres, à la guerre civile.

 

 

 

Ce nouvel épisode, prouve encore une fois, pour ceux qui veulent bien regarder la vérité en face, que le clivage reste réel entre une Tunisie civile et moderniste qui puise de son héritage ses plus beaux acquis pour aller de l’avant et regarder vers l’avenir ; et une autre Tunisie, marginale mais qui a un grand pouvoir de nuisance, qui essaie de stopper tout élan de progrès ne s’intéressant qu’à un passé pas reluisant du tout ou à un présent chaotique et sanguinaire.

 

Encore une fois, on se retrouve à la case départ, celle du choix du projet sociétal. Tant que cette question ne sera pas définitivement tranchée, les tentatives de freiner les élans du progrès continueront et profiteront, d’une manière épisodique mais handicapante, des contextes politiques, des fausses manœuvres et des desseins que d’autres esprits tordus préconisent pour notre pays.

 

 

 

Que des mercenaires des ligues dites de protection de la révolution, au service du pétrodollar forcément contre-révolutionnaire, comme cette Hlima Maalej appelle à une insurrection à partir des mosquées ; que ce charlatan de Adel Almi qui a prouvé à tous les Tunisiens, pas plus tard que le mois dernier, qu’il est prêt à se vendre pour une poignée de dollars, appelle à la lapidation de la présidente et des membres de la commission pour les libertés individuelles et l’égalité, que les salafistes d’Ettahrir refusent en bloc le rapport, passe encore.

 

Toutefois, la manœuvre la plus dangereuse parce qu’elle est la plus pernicieuse émane de l’ancien ministre des Affaires religieuses de la troïka, Noureddine Khademi. Voilà quelqu’un, qui a été l’imam de la fameuse mosquée Fath au début de la révolution, l’ami d’Abou Iyadh, un soutien indéfectible du salafisme et a appelé ouvertement au jihad, qui veut se doter aujourd’hui d’une autorité religieuse autoproclamée. Entouré de représentants de quelques associations inconnues, il annonce que les projets de la commission des libertés individuelles et de l’égalité doivent être soumis à l’avis de l’autorité religieuse des cheikhs zeitouniens.

 

 

 

Son argument qui se veut d’autorité et son discours qu’il veut passer pour une vérité sont totalement fallacieux et donnent la preuve de l’étendue du machiavélisme satanique du salafisme. D’abord parce qu’il n’existe pas une autorité religieuse appelée l’autorité de la Zeitouna. Elle n’a jamais existé. Ce n’est pas maintenant qu’on va s’y mettre. D’ailleurs son appel adressé au mufti pour se prononcer sur les projets présentés par la commission des libertés individuelles et de l’égalité est une autre manœuvre maléfique de la part de Noureddine Khademi pour faire entrer son auditoire dans la logique de l’autorité religieuse.

 

Pourtant, il est bien placé pour savoir que le mufti n’est pas une autorité religieuse mais uniquement une autorité administrative qui a pour mission la gestion des pratiques religieuses dans le pays. D’un autre côté, la proposition de Khademi est incongrue parce qu’elle tente de ramener le débat dans le cercle religieux alors qu’il concerne, ni plus, ni moins des propositions législatives pour gérer les affaires des citoyens, hommes et femmes entre eux, dans un esprit d’égalité et de respect des libertés individuelles comme le stipule clairement la constitution tunisienne qui ne tolère aucune exception concernant ces principes.

 

 

 

Face à ces manœuvres, le rôle du chef de l’Etat sera déterminant. On attendra avec impatience le 13 août prochain pour connaitre la suite qu’il va donner à son initiative lancée il y a un an. Le président Caïd Essebsi, qui tient tant à sa filiation à la pensée bourguibienne, a l’occasion maintenant de prouver qu’il en est le digne héritier en se dotant du même courage politique légendaire de Bourguiba. Les associations de la société civile et les partis modernistes ne sont pas exempts de cette bataille pour un modèle tunisien qui renforce les libertés, toutes les libertés, et qui bannit les archaïsmes.

 

url : http://www.businessnews.com.tn/libertes-individuelles-et-egalite--le-modele-de-societe-au-centre-de-la-bataille,523,80848,3

Publié dans TUNISIE Spécial

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