Le Parti communiste, parti de l'avenir en Afrique du sud: avec plus de 100 000 adhérents, un parti jeune et ouvrier dont les effectifs doublent tous les trois ans
Le Parti communiste, parti de l'avenir en Afrique du sud: avec plus de 100 000 adhérents, un parti jeune et ouvrier dont les effectifs doublent tous les trois ans
Le Parti communiste d'Afrique du sud (SACP) est, au cours de ce mois de décembre, au cœur du mouvement communiste international avec l'organisation du 3 au 5 décembre de la 12ème rencontre internationale des Partis communistes et ouvriers puis, du 13 au 21 décembre, du 17ème Festival mondial de la jeunesse démocratique (FMJD) à Johannesbourg.
Or, ce choix n'est pas anodin.Il récompense un Parti communiste à la longue histoire de lutte, contre l'apartheid et contre tout système d'oppression et d'exploitation, un Parti communiste qui a choisi de le rester au moment où d'autres choisissaient le renoncement, un Parti communiste partie prenante d'un processus révolutionnaire qu'il essaie d'approfondir sans abdiquer son autonomie politique et son rôle dirigeant dans la lutte de classe.
Un parti en pleine expansion: doublement des effectifs tous les trois ans depuis 2004
Il met en valeur surtout un Parti en pleine expansion.
En effet, le Parti communiste vient de rendre les chiffres actualisés sur les effectifs militants du parti:le Parti communiste d'Afrique du sud compte désormais 109 138 adhérents.
Pour juger correctement de la performance réalisée par nos camarades sud-africains, il convient de rappeler que le Parti comptait seulement 25 000 militants en 2004, et encore que 50 000 militants lors du dernier congrès ordinaire du Parti en 2008. Autrement dit, le Parti communiste d'Afrique du sud double tous les deux ans son effectif militant.
Le parti de l'avenir: la majorité des militants du parti ont moins de 40 ans
Une des explications de la progression exponentielle du Parti communiste sud-africain réside dans l'attrait du communisme dans la jeunesse sud-africaine et par conséquent le rajeunissement conséquent des effectifs du Parti.
La « presse bourgeoise » annonçait récemment que près de 70% des militants du Parti auraient moins de 35 ans. Les chiffres du Parti tendent à confirmer, avec prudence, ce fait puisqu'ils annoncent que la majorité des militants ont moins de 40 ans.
Une des explications de ce décalage réside dans l'intégration ou non des effectifs de la Jeunesse communiste (YCL). En effet, la Jeunesse communiste sud-africaine joue un rôle crucial dans la pénétration des idées communistes au sein de la jeunesse sans pour autant que les jeunes n'adhèrent, dans un premier temps au Parti communiste.
Ainsi, les chiffres officiels du Parti n'annoncent que 580 militants de moins de 20 ans. Chiffre qui masque un encartement massif de la jeunesse sud-africaine au sein de la Jeunesse communiste, conçu comme sas de formation politique avant le passage au Parti communiste.
Le Parti de la classe ouvrière sud-africaine
Se présentant comme le « Parti de la classe ouvrière sud-africaine », le PC sud-africain a longtemps été plus un parti d'avant-garde composé de révolutionnaires professionnels forgée dans la lutte clandestine. Sans renier cette identité première, le PC sud-africain est aujourd'hui un véritable parti de masse et de classe.
Bien qu'il soit difficile de prouver l'ancrage ouvrier du Parti dans les chiffres, une preuve suffisante est l'importance stratégique que revêt désormais pour l'ANC de l'alliance avec le Parti communiste et la COSATU perçus comme la base ouvrière de l'alliance.
Comment expliquer cet ancrage ouvrier de masse relativement nouveau du Parti communiste sud-africain?
Tout d'abord, par l'orientation stratégiquement juste du Parti consistant à privilégier la constitution d'organisations de base du Parti sur les lieux de travail, à l'entrepriseet, là où cela n'est pas possible, dans les quartiers, les communautés. Ensuite, par des campagnes de masse sur des thèmes reliant lutte quotidienne et perspective socialiste telles que les campagnes « Octobre rouge » luttant pour un Service national de santé et une Sécurité sociale publics, universels et gratuits.
Toutefois, un rôle central dans ce lien que construit le Parti communiste avec la classe ouvrière sud-africaine réside dans le rapport privilégié qu'entretient le PC sud-africain avec la COSATU (Congrès des syndicats sud-africains). Premier syndicat de la classe ouvrière sud-africaine, la COSATU s'est rapproché considérablement du SACP au cours des dernières années et entamant une relation mutuellement avantageuse avec lui: le SACP apporte au syndicat dynamisme et direction politique, la COSATU sert de passage pour les éléments les plus combatifs et les plus conscients vers le Parti communiste.
Quel avenir pour l'alliance stratégique entre ANC et Parti communiste?
Une autre explication de cette construction récente du Parti communiste comme parti de masse peut être trouvée dans la décision stratégiquement juste, il y a seize ans, de perpétuer l'alliance nouée avec l'ANC de Mandela dans la clandestinité en participant au processus révolutionnaire national-démocratique dans les institutions d'Etat nationales et locales.
Cette orientation n'est pas sans avoir provoqué des contradictions, surtout sous le règne droitier de Thabo Mbeki de 1999 à 2008. Le SACP n'a jamais abdiqué son autonomie politique et son sens critique vis-à-vis de l'ANC. Il a toujours mené les luttes de la classe ouvrière sud-africaine, aux côtés de la COSATU, sans jamais faire le jeu de la droite nostalgique de l'apartheid.
Aujourd'hui, un peu plus de 60 000 militants communistes sont également membres de l'ANC. Un nombre croissant de militants communistes refusent d'adhérer à l'ANC, ne trouvant aucune raison d'adhérer en parallèle à une organisation de libération nationale de plus en plus gangrénée par l'opportunisme.
La grande grève d'août-septembre 2010, dont la force motrice fut les fonctionnaires affiliés à la COSATU, qualifiée de « plus grande grève de l'histoire sud-africaine »par le secrétaire-général de la SADTU (syndicat enseignant de la COSATU) a démontré toutes les contradictions de l'alliance révolutionnaire entre ANC, COSATU et SACP. Elle a divisé l'alliance en deux camps où l'ANC s'est révélé un patron arrogant et intransigeant, forçant les fonctionnaires menés par la COSATU à perdre un mois de salaire pour obtenir gain de cause.
Dans cette lutte, le SACP a encore gagné un aura particulier auprès des fonctionnaires sud-africains. Le secrétaire-général de la SADTU, contre les critiques malhonnêtes lancées par certains a tenu à souligner qu' « il est évident pour nous que le Parti n'a pas seulement soutenu les travailleurs, mais était présent sur le terrain dans chaque province ».
Mais combien de temps de telles contradictions pourront-elles être contenues dans le cadre d'une alliance qui s'étire de plus en plus jusqu'à la diviser en deux camps opposés?
L'élection de Jacob Zuma à la tête de l'ANC et de l'Etat sud-africain était l'ultime espoir d'un coup de barre à gauche de l'ensemble de l'alliance. Deux ans après, son bilan social à la tête de l'Etat est plus que mitigé, et c'est seulement sous la pression des luttes que le gouvernement mené par l'ANC a été contraint de prendre certaines mesures limitées en faveur des travailleurs.
Si l'avenir de l'Alliance historique est incertain, une chose est sûre: le Parti communiste est plus fort que jamais, et les objectifs stratégiques enthousiastes du Parti de construire un Parti de 200 000 militants d'ici 2012 et de 500 000 militants d'ici 2014 sont tout sauf irréalistes!