octobre 88 - 1 Le 5 octobre 1988 des jeunes et celui des «professionnels partie2
SIDI-BEL-ABBES
Le mouvement populaire a éclaté samedi après-midi simultanément dans plusieurs quartiers populaires et dans le centre-ville. L’armée avait auparavant occupé les principaux points de la ville et de la zone industrielle.
On parle de 500 à 600 détenus dont une bonne partie a été libérée à partir du commissariat et au niveau du tribunal. Les autres ont bété présentés devant le juge le mardi. Ce jour là le tribunal était encerclé par les forces de l’ordre ce qui n’a pas empêché la population de se regrouper dans les alentours pour scander : »Police assassin », « libérer les détenus », « Bouragda assassin » (le chef de la sureté de la wilaya), « soldats, vous êtes des hommes ». Bouragda s’est présenté face aux manifestants et a demandé aux policiers de tirer, mais un capitaine de gendarmerie l’a insulté et a demandé à la police de partir. Par la suite la gendarmerie a dispersé les manifestants sans user de la force.
Un travailleur de l’ENIE ayant été arrêté sur sont lieu de travail, la riposte des travailleurs a été immédiate : délégation auprès des autorités, de l’administration et de l’Atu ; des produits alimentaires et de l’argent ont bété remis à la femme du travailleur ; des avocats ont été contactés…
Les travailleurs, apprenant au même moment que la ville entière commençait à bouger, ont pris des mesures pour prévenir toute provocation au sein du complexe. Ils ont constitué un système de garde et d’alerte.
A noter que le samedi matin, avant que les troubles n’éclatent en ville, la cellule FLN a établi une liste de progressistes du complexe considérés comme des « meneurs possibles ». Elle a remis cette liste à la mouhafadha. Le mouhafadh aurait répondu : vous vous trompez. Ces gens là sont des patriotes. Ce ne sont pas eux qui font faire des troubles.
SAÏDA
La ville n’a pas connu d’émeutes ni de destructions. Après un large mouvement de protestation organisé (grèves, marches pacifiques), un comité de citoyens a été constitué et chargé de soumettre les revendications des citoyens aux autorités locales. Le comité se compose de représentants des travailleurs de tous les secteurs, des chômeurs, des enfants de chouhada et des étudiants.
La liste des revendications est longue (une vingtaine de points) et aborde aussi bien les revendications démocratiques que des revendications sociales et professionnelles (…)
ANNABA
Depuis le mois d’aout, la tension sociale et politique s’était manifesté de différentes manières : slogans anti-Chadli, slogans dénonçant la corruption et le frère du président écrits sur les murs, luttes pour l’eau.
Des mouvements de masse ont eu lieu en été comme cette prise d’assaut par les jeunes du bureau d’affectation du Service national (ces jeunes demandaient que soit levée la condition d’avoir fait son SN pour aller travailler), mouvements contre les coupures d’eau,…
La population a suivi attentivement l’issue de la grève du CVI et les émeutes d’Alger. Les jeunes ont exprimé leur solidarité dès le 08 octobre, en abandonnant les lycées et en manifestant vers le centre. Cibles choisies : l’hôtel du frère de Chadli (obtenu parait-il pour un dinar symbolique) et le restaurant appartenant à un ex-commandant, affairiste notoire Karroumi (dit Soula), le FLN et les locaux commerciaux du chef de sureté de la Wilaya Embarek. Les services de sécurité étaient là pour défendre les lieux et tirèrent sur les manifestants en tuant 5 d’entre eux. L’adjoint du chef du secteur militaire circulait au volant d’une R20, mitraillette au poing.
Les galeries, le monoprix, des cars de la régie communale de transport, le souk el fellah ont été incendiés. Le soir, le calme est revenu. Le lendemain, les manifestations reprennent. Les forces de répression tirent : 3 morts, de nombreuses arrestations. La SM arrêt trois syndicalistes du complexe à « titre préventif », le 09 octobre. Ils ont été relâchés le 12, suite à une menace de grève de la part des travailleurs d’El-Hadjar.
Le 10 octobre, une marche regroupant plus de 5000 étudiants à laquelle ont participé des jeunes de la commune de Sidi-Amar, a eu lieu. Les manifestants ont fait le tour de Chaïba et de Sidi-Amar. Au cours de cette marche, les étudiants ont diffusé un appel à la population, réaffirmant la nécessité de rester unis et lutter ensemble pour la démocratie et la paix en Algérie. Le 11 octobre, assemblée générale à l’université que les FM essaieront de saboter. Le 12 octobre, les étudiants, au nombre d’un millier, décident de marcher sur la ville de Annaba mais ils ne pourront pas le faire : le train devant les amener en ville (environ 12 km) ayant été bloqué. Ils décident alors de marcher sur El-Hadjar qui est à 2 km de l’université. Et bien que de nombreux étudiants aient été découragés : ils n’étaient plus que 200 à 300, la majorité des mots d’ordre, le niveau d’organisation de la marche ont eu un grand impact sur la population.
A noter que tout le barreau de Annaba a refusé de cautionner la procédure expéditive imposée par les autorités judiciaires lors des premiers procès des détenus de la ville. Il s’organise pour manifester un rejet collectif de la procédure illégale. Mais Denden, représentant de la LADH, qui a participé au procès des inculpés a déclaré : « la justice a fait son travail ; ça s’est bien passé » !
BEJAÏA
La manifestation a commencé chez les lycéens, elle a gagné les quartiers populaires. Les slogans lancés « halte à la vie chère », « non aux exclus de l’enseignement », « que vont devenir les 200 000 élèves qui ont échoué au bac ». Des affrontements violents ont eu lieu avec la police et la gendarmerie. Ils se sont soldés par 7 morts, 34 blessés et une trentaine d’arrestations parmi la population.
A Amizour, des centaines de jeunes ont participé à la manifestation contre la répression qui s’est abattue sur la population de Bejaïa. Sur les 7 banderoles, on pouvait lire : « contre la répression », « contre la vie chère », « pour le pain et l’emploi », « pour les libertés d’expression et la démocratie », « contre les exclus de l’enseignement », Cinq jeunes ont été arrêtés.
CONSTANTINE
La population n’a pas bougé, conséquence entre autres de la dure répression des mouvements passés. On a fait circuler la rumeur suivante : Il y a 6000 personnes fiché par la police. Présence massive mais relativement discrète des services de sécurité et de l’armée. Sur- approvisionnement des souk el fellah. Directives aux unités pour éviter tous problèmes et conflits.
SKIKDA
Il y a eu une vingtaine d’arrestations « préventives » le 09 octobre, notamment parmi les anciens responsables de l’UNJA. Ils ont été relâchés le 12 octobre.
GUELMA
Violentes émeutes. La mouhafadha et le palais de justice ont été saccagés.
JIJEL
Emeutes au cours desquelles il y aurait eu des victimes.
EL-EULMA
Fort mouvement dans cette localité.