Le BTPH, un marché en forte croissance Pourquoi les entreprises algériennes n’en tirent-elles pas assez profit ?

Publié le par Mahi Ahmed

CHRONIQUES MEKIDECHE

Le BTPH, un marché en forte croissance

Pourquoi les entreprises algériennes n’en tirent-elles pas assez profit ?

S’il y a un secteur pour lequel la substitution aux importations de services peut être accélérée et élargie à court terme, c’est bien celui du BTPH, préparant, ce faisant, nos entreprises de construction à la conquête des marchés extérieurs. Comme je l’avais déjà écrit dans une chronique précédente consacrée à ce secteur, il faudra croiser deux regards pour porter un diagnostic complet sur la situation et pouvoir ainsi identifier les raisons qui empêchent nos entreprises de produire plus un bâti conforme aux coûts, normes et standards internationaux. Rappelons que ces coûts, normes et standards internationaux sont relatifs à la maîtrise de coûts (cost control), incluant la productivité par corps de métier, à celle des délais de réalisation (planning) et enfin à la conformité à un niveau adéquat de qualité des ouvrages (quality control). Trois paramètres qui échappent, pour le moment, au savoir-faire de la majorité de nos entreprises du BTPH. Aussi ces deux regards différents, celui des chefs d’entreprise locaux, d’une part, et celui des maîtres d’ouvrages et donneurs d’ordres, d’ordre part, vont être sujet à débats contradictoires mais finalement utiles pour tous. En fait cet exercice national avait été déjà initié par la 15e réunion tripartite du 10 octobre 2013. Sa feuille de route avait été bien balisée puisque le groupe de travail institué à cet effet devait traiter des “modalités facilitant l’intervention des entreprises nationales du BTPH dans la réalisation du programme national d’équipement”. Depuis le rapport a été élaboré et approuvé par toutes les parties lors de la 16e tripartite tenue le 23 février 2014. Le tout est, à présent, de savoir si le train de recommandations issues de ce rapport a été mis en œuvre par les pouvoirs publics et les partenaires sociaux et, le cas échéant, avec quel degré d’efficacité. Dans le même ordre d’idées, les 3es Assises du BTPH, tenues le 8 février 2014, avaient mis en exergue la problématique de l’asymétrie du rapport de forces commercial et technique entre l’offre locale et l’offre internationale. Du fait notamment que “les entreprises étrangères sont accompagnées de leur puissante organisation, leurs supports diplomatiques et politiques ainsi que e leurs banques”. Continuer à faire réaliser nos logements et nos infrastructures par des entreprises étrangères en clés en main est intenable du fait des contraintes budgétaires qui commencent déjà à peser. D’un autre côté, s’échiner à vouloir renverser brutalement ce rapport de forces historiquement inégal est inefficace. Cela ne servira à rien compte tenu, d’une part, de l’ampleur des déficits à rattraper dans les infrastructures et l’explosion de la demande sociale et d’autre part, à la faiblesse quantitative et qualitative de l’offre locale de réalisation. Pour sortir de cette impasse sectorielle une démarche nouvelle est possible. Elle s’inscrit d’ailleurs dans la nouvelle vision industrielle et celle de la substitution aux importations. Ainsi au lieu d’essayer de remonter le cours à contre-courant, il vaut mieux le dévier. Comment ? En engageant des partenariats intégrés avec des groupes étrangers de premier plan en s’y impliquant opérationnellement au lieu de se contenter d’une posture de “sleeping partners”. En faisant aussi de la croissance externe par l’acquisition de participations totales ou partielles de groupes étrangers de BTPH, notamment européens, en difficulté sur leurs marchés nationaux respectifs du fait de la crise. Pour ce faire les pouvoirs publics et les donneurs d’ordre nationaux devraient privilégier cette stratégie en lieu et place d’une stratégie décalée de signature de contrats clés en main tous azimuts à l’issue de laquelle rien ne restera en Algérie, en termes de capacités de réalisation. Dans ce contexte de faisceaux de contraintes identifiés, aggravé en plus par le recul de nos capacités financières, notamment budgétaires, la 18e édition du Salon international du bâtiment, des matériaux de construction et des travaux publics (Batimatec) tenue à Alger du 3 au 7 mai 201 a-t-elle apporté quelque chose de nouveau en matière d’élargissement de l’assiette d’intervention des entreprises locales ? Je ne le crois pas. Les 640 exposants étrangers, sur les 1200 présents, sont venus tout simplement en quête de marchés solvables sans, me semble-t-il, se voir opposées des contreparties contractuelles d’intégration au moment où la grande campagne du consommer national venait d’être lancée. L’anticipation a manqué, au même titre que pour les salons professionnels précédents (bien d’équipements pétroliers, agroalimentaire, plasturgie), pour produire et avancer des idées nouvelles et des approches différentes en matière de cotraitance et de substitution aux importations de biens et de services. On est toujours arrimé au même paradigme que tout s’achète à l’étranger et que toute valeur ajoutée nationale est immanquablement porteuse de retards et de surcoûts. Mais malgré tout des grands groupes publics et privés du BTPH commencent à émerger. Ils commencent à élargir, la taille des projets qu’ils réalisent, seuls ou en association. Par ailleurs l’offre locale de matériaux de construction s’élargit et s’élargira de plus en plus les prochaines années : ciment, acier, briqueteries, faïenceries, plâtreries, etc.

On voit bien, à l’issue de cette analyse, que les perspectives de croissance des entreprises algériennes du BTPH ne seront assurées que pour autant que ces dernières investissent, par la formation et l’amélioration de leur management opérationnel et technique, dans l’appropriation des savoir-faire collectifs de l’ensemble de leurs métiers. Evidemment les pouvoirs publics devront réaliser leur part du contrat en matière de débureaucratisation de leurs procédures, notamment celles du choix des entreprises et du paiement de leurs situations de travaux, d’accompagnement des formations aux métiers du BTPH.

Disons pour conclure que l’espoir est permis pour ce secteur en matière de substitution aux importations et même d’exportation massive de matériaux de construction et de services de construction.

M. M

Sorce: L⁄berté du 13515

Publié dans Economie et société

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